Conférence : « Les Musées, vecteurs de transmission de la connaissance »

A quoi servent les musées ? Cette question, aussi simple qu’elle soit, constitue un point de départ de toute la réflexion sur la place et le rôle du musée dans un pays comme Madagascar où la notion de patrimoine, dans son sens de bien commun, n’occupe pas encore une place importante. C’est donc lors d’une rencontre, digne d’une conférence universitaire, qui s’est déroulé le 18 mai dernier au Musée de la Photo Anjohy, que quelques passionnés se sont donnés rendez-vous pour décortiquer cette énigme.

Helihanta Rajaonarison, historienne et présidente fondatrice du musée de la photo, Bako Rasoarifetra, archéologue et Présidente du Conseil international des musées à Madagascar (ICOM), Nasolo Valiavo Andriamihaja alias Vanf répondent tous unanimement à cette question que « Les musées ne sont pas (seulement) des lieux d’exposition destinés à divertir les visiteurs, ou des entrepôts pour conserver les objets oubliés et des archives qui ne servent plus. Les musées, ce sont des outils pour ranimer l’histoire. C’est également un espace pour redynamiser les connaissances et la culture ». Un musée a donc tout d’abord ce devoir de mémoire et de sauvegarde en tant que témoin de l’histoire et de la culture. Il joue un rôle privilégier dans l’éducation à l’histoire et au patrimoine, puis il assure un devoir de transmission.

Pour que les musées existent donc, il doit y avoir des travaux de recherches, d’où la discipline de muséologie. Un domaine qui n’est pas encore très répandu à Madagascar du fait que le pays manque énormément de musées. Madagascar compte actuellement une trentaine de musée. Et encore, certains d’entre eux risquent la fermeture, faute de moyens. Et vice-versa, puisque les rares musées qui existent ne remplissent pas encore toutes les cases pour répondre à leurs attributions, le domaine des recherches sur les musées n’attire pas forcément les chercheurs.

Une des lacunes à Madagascar est également cette méconnaissance de la valeur des patrimoines, que ce soient les patrimoines matériels aussi bien que les patrimoines immatériels. Beaucoup ont déjà été fait, certes, dans cette voie si on ne se réfère qu’aux efforts entrepris depuis des années pour l’inscription de nos patrimoines dans la liste de l’Unesco. Malheureusement, ces reconnaissances n’engagent et n’émeuvent que les érudits.

Le maillon qui devrait relier ces travaux de sauvegarde à son impact sur l’éducation, les connaissances et la culture est faible. Il s’agit pourtant d’une mission de valorisation de la culture comme bien social, voire, de faire en sorte que le domaine culturel, à travers la muséologie, devienne un levier du développement économique. Car il ne faut pas négliger les potentiels économiques des musées si on ne parle que de leur apport dans le tourisme.

Sens du bien commun :

On peut également déplorer le manque de volonté politique et institutionnelle pour sauvegarder les patrimoines.

La conférence d’Anjohy semble en effet faire écho à une autre rencontre scientifique qui s’est tenue à l’Université d’Ankatso le 24 avril dernier. Lors d’un colloque intitulé « Paysage et architecture d’Antananarivo. De la connaissance à la sauvegarde », l’éminent Professeur Rafolo Andrianaivoarivony a établi un bilan sombre sur l’avenir du dossier malgache auprès de l’Unesco pour l’inscription dans sa liste de patrimoines universelles la Haute ville de la capitale, malgré le fait que sa valeur universelle exceptionnelle (VUE) est déjà reconnue par cette institution onusienne. Un bel élan qui flanchait depuis les travaux de « bétonnage » qui envahissent désormais ce patrimoine. Pure méconnaissance ou simple folie de grandeur démesurée ? Les conséquences de ces décisions politiques et projets sont néfastes. Le Pr Rafolo Andrianaivoarivony est catégorique :  la haute ville d’Antanarivo n’est plus « authentique », elle risque même de perdre son statut de VUE. Le rêve de Vanf, présenté lors de la rencontre d’Anjohy de voir un « Antananarivo, muse à ciel ouvert » s’envole ainsi d’un seul coup.

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Un grand écart semble ainsi s’est créé entre la volonté de protection et de revalorisation de ces richesses nationales et la prise de conscience collective. Et c’est là que les musées sont essentiels pour initier la démarche de rapprochement.

Les musées apportent des éléments de réponse à l’éternelle remise en question de notre histoire et de notre identité et de la valeur que représente ces biens matériels. Les musées sout des outils par excellence des chercheurs pour former et véhiculer cette connaissance sur la culture et le patrimoine.

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